Le 5 mai dernier, Muriel Pénicaud, Ministre du Travail (NDLR : remplacée depuis par Elisabeth Borne, suite au remaniement ministériel du 6 juillet 2020) , a annoncé un plan de contrôle du dispositif d’activité partielle (ou chômage partiel) suite à la crise liée à la Covid-19.
Objectif : 50 000 vérifications d’ici la fin de l’été.
Pour rappel, plus de 12 millions de salariés et 1,2 million d’entreprises ont été indemnisées à un moment donné pendant cette crise. Dans la très grande majorité des cas, les demandes d’activité partielle ont été validées a priori sous 48h, compte tenue de la crise. Devait donc arriver le temps des contrôles a posteriori. Ils ont démarré depuis le 22 mai dernier. Et mieux vaut être bien préparé…
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Quels contrôles et quels objectifs ?
Quelle distinction entre l’erreur de bonne foi et la fraude ?
Quelles entreprises contrôlées ?
Qui contrôle ?
Il s’agit des DIRECCTE (Directions Régionales des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi) qui réalisent les contrôles suite aux demandes d’activité partielle. Dans les faits, l’entreprise qui se fait contrôler reçoit généralement par e-mail une demande d’informations de la DIRECCTE.
Quels contrôles et quels objectifs ?
Pour un contrôle le plus efficace possible, des procédures croisées entre administrations ont été prévues et détaillées dans une instruction envoyée aux DIRECCTE le 14 mai 2020.
Le plan de contrôle prévoit trois niveaux de vérifications et de contrôles :
• La détection et le croisement de données administratives via les contrôles embarqués dans les systèmes d’information ;
• Le contrôle sur pièces, permettant de faire un examen du dossier et des documents nécessaires aux investigations (voir plus bas) ;
• Le contrôle sur place, permettant de réaliser un contrôle approfondi d’une situation. Ici, il est possible d’interroger directement le chef d’entreprise, des représentants du personnel et des salariés, par exemple en cas de suspicion marquée de fraudes ou de signalements.
Quelle distinction entre erreur de bonne foi et fraude ?
Parmi les erreurs constatées suite à un contrôle, le Ministère du travail identifie deux cas de figure bien distincts :
• Les entreprises qui ont commis, de bonne foi, des erreurs lors de leur demande ;
• Les entreprises qui ont volontairement fraudé.
Dans le cas d’une erreur de bonne foi de l’entreprise, l’objectif est de régulariser la situation à l’amiable (qu’elle soit ou non favorable à l’entreprise), conformément au principe du droit à l’erreur instauré par le Gouvernement. La situation de cette crise étant exceptionnelle, et le contexte de mise en place des ces mesures d’activité partielle l’étant tout autant, le Ministère du Travail reconnaît la difficulté pour les entreprises de bien appréhender ce dispositif. De ce fait, si l’entreprise doit rembourser des sommes perçues en trop, des aménagements de remboursements peuvent être mis en place en fonction de la situation financière de l’entreprise. De même, des solutions d’accompagnement peuvent être proposées, notamment pour les entreprises en difficulté.
Dans le cas d’une suspicion de fraude, le Ministère du Travail rappelle que l’élément intentionnel – à savoir une intention délibérée de tromper – devra être constaté.
Très concrètement, les agents de contrôle sont essentiellement invités à repérer les cas où des entreprises ayant demandé à bénéficier de l’activité partielle auraient demandé en parallèle à ces mêmes salariés de travailler (en télétravail surtout). Autrement dit, où la fraude consiste à faire supporter par l’Etat un salaire qui aurait dû être assumé par l’entreprise. Autres pistes : des demandes de remboursement majorées par rapport au salaire effectivement payé ; et des demandes d’indemnisation pour des heures pendant lesquelles les salariés étaient en congés payés / JRTT.
Quelles entreprises contrôlées ?
Hors contrôles aléatoires mentionnés ci-dessus, des entreprises ont été plus spécialement visées pour ces contrôles :
• Les entreprises qui ont présenté des demandes d’indemnisation sur la base de taux horaires élevés ;
• Les entreprises appartenant à des secteurs fortement consommateurs d’activité partielle (BTP, activités de services administratifs, de soutien et de conseil aux entreprises) ;
• Les entreprises dont l’effectif est composé d’une majorité de cadres et dont l’activité est susceptible d’être exercée en télétravail.
De plus, tout signalement transmis par les salariés, les organisations syndicales de salariés, ou les CSE à l’administration devra être traité de façon systématique et rapide par les DIRECCTE.
Quelles pièces demandées lors d’un contrôle ?
Nous avons pu récupérer la liste des pièces qui ont jusqu’alors été sollicitées dans le cadre d’un contrôle sur pièces. Dans la très grande majorité des entreprises interrogées, la liste des pièces demandées était identique, à savoir :
• Les justificatifs détaillés précisant les effets de l’épidémie de Covid-19 sur l’activité de l’entreprise ayant motivés le recours au dispositif ;
• Les copies des bulletins de paie des salariés pour les mois d’activité partielle contrôlées par les DIRECCTE, faisant apparaître le taux horaire brut initial et les heures/jours chômés au titre de l’activité partielle ;
• La copie des plannings de tous les salariés pour les mois d’activité partielle contrôlées par les DIRECCTE ;
• La copie des accords d’entreprise/groupe ou extraits de la convention collective applicables à l’entreprise justifiant les éventuels calculs de taux majorés (par exemple une durée de travail supérieure à 35 heures par semaine) ;
• Les copies des contrats de travail des salariés concernés en forfait heures/jours supérieurs à la durée légale ;
• Les copies des justificatifs et noms des salariés placés en activité partielle motivés par la nécessité de garder leur(s) enfant(s) ou en situation de vulnérabilité face au Covid-19 pour eux même ou bien leur(s) proche(s) ;
• Le PV du CSE (Comité Social et Économique) qui évoque la mise en activité partielle.
Comme vous pouvez le constater, lors d’un contrôle sur pièces, les justificatifs sont nombreux. Mieux vaut bien être préparé en amont, car le délais pour répondre à un contrôle et fournir les justificatifs est très court.
Quel délai pour répondre ?
8 jours. C’est le délai de réponse fixé généralement constaté dans les demandes de contrôles sur pièces reçues par e-mail. C’est un délai très court, qui demande une vive réactivité.
Quelles sanctions ?
Il y a bien sûr plusieurs niveaux de sanction, en fonction du type d’irrégularité, ou de la fraude avérée.
Les sanctions possibles en cas d’irrégularité :
• Le retrait de la décision d’autorisation de mise en activité partielle si cette demande ne remplissait pas les conditions légales ;
• Le retrait de la décision d’indemnisation ;
• La régularisation des demandes d’indemnisation payées (qu’elle soit favorable ou non à l’entreprise). Dans ce cas, la régularisation peut être volontaire de la part de l’entreprise, ou s’opérer par le biais d’une procédure de reversement.
Les sanctions possibles en cas de fraude (pénales et administratives) :
• Sanctions administratives (Article L8272-1 du Code du travail) :
– Remboursement des aides liées à l’activité partielle et de toute aide publique perçue au cours des 12 derniers mois précédant l’établissement du procès-verbal ;
– Interdiction de bénéficier d’aides publiques pendant 5 ans.
• Sanctions pénales pour fraude (Article 441-6 du Code pénal) :
– Jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende pour travail dissimulé (Articles L8221-5 et L8224-1 du Code du travail).
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